Exercice I (l’affaire Stern) – Lancez-vous : l’erreur est levier de progression

Chers lecteurs,

J’inaugure actuellement une nouvelle phase de mon activité professionnelle au sein de laquelle j’ai décidé d’octroyer l’essentiel de mon temps à la transmission des connaissances que j’ai acquises grâce, avant tout, à ma pratique clinique en tant que psychologue légale et psychothérapeute.

Les trois derniers articles parus sur mon blog (Actes I à III) constituent la chair de mes intérêts premiers et donnent un aperçu de ce que le modèle structurel est apte à offrir en matière d’évaluation des tenants et aboutissants du passage à l’acte criminel.

A présent, il est temps que le lecteur qui œuvre à la résolution de telles questions puisse lui-même expérimenter l’évaluation clinique des protagonistes d’une affaire criminelle selon la méthode que je propose, si tant est que cette dernière l’intéresse.

Pour ce faire, j’ai choisi de lui soumettre le cas de l’affaire Stern, du nom du banquier installé en Suisse et qui a trouvé la mort à son appartement en 2005, exécuté par sa compagne.

L’affaire est traitée par le magazine télévisé Zone d’ombre réalisé par la Télévision Suisse Romande, et dont l’épisode est intitulé : « L’affaire Stern :  Amour à mort ». Il est accessible à cette adresse.

J’offre donc un premier exercice en invitant les professionnels intéressés à regarder l’intégralité de ce document et à se laisser guider par mes questions pour résoudre l’énigme suivante : quelle est la structure psychique de la meurtrière et quelle est celle de la victime ?

Tentez le coup, et trompez-vous. On ne peut pas apprendre sans se tromper.

Si vous souhaitez participer à cette expérience, annoncez-vous auprès de moi via le formulaire de contact. Vous me ferez ensuite parvenir vos réponses aux questions par mail, et je me ferai un plaisir de les analyser et de vous offrir mes commentaires afin que vous puissiez vous perfectionner.

Les questions qui constituent la trame du présent article vous permettront de réfléchir aux aspects probants pour l’analyse. La formation préalable nécessaire pour mener à bien cet exercice consiste à lire avec attention les articles et documents suivants, déjà parus sur mon site :

La question-phare à laquelle vous aurez à répondre est donc la suivante : quelle est la structure psychique de chacun des amants et en quoi cette information sur la personnalité de chacun explique-t-elle le passage à l’acte de la maîtresse ?
Indice : explorez le rapport à la sexualité d’Édouard Stern et le rapport au défunt de Cécile Brossard.

Question subsidiaire donc : comment définiriez-vous une sexualité perverse, et dans quelle mesure les amants sont-ils concernés par le sujet ? Pour valider/affiner votre hypothèse, vous pouvez vous aider de l’émission radio d’Hondelatte sur l’affaire.

S’agissant de la structuration psychique de la victime, je vous aide également en pointant l’anamnèse de Stern, en posant la question suivante :
Quels sont les éléments qui permettent de poser l’hypothèse selon laquelle le père de Stern est une structure rose ? Il est dit dans le documentaire que ce père, qui dirigeait la banque familiale avant que son fils ne reprenne les rennes, était « incompétent » à cette tâche. Ainsi, qu’est-ce qui permet de poser l’hypothèse que ce père était un individu rose et pas un homme bleu d’intelligence moyenne ou inférieure ?

Quel est le niveau d’intelligence de Stern ? Et quel est l’interêt de cet élément pour comprendre les faits ?

Je définis la personnalité borderline d’après les critères qui figurent dans le DSM. Les critères étant symptomatiques (le DSM est un manuel psychiatrique statistique), cette appellation ne peut à mon sens s’adresser aux personnalites symbolisantes (soit les verts et les bleus). Partant, je considère que ce terme doit être réservé aux sujets de structure psychotique (structure non symbolisante, rose).
Ainsi, ma question est la suivante : l’auteur du crime possède-t-elle, selon vous, une personnalité borderline, comme cela est mentionné dans le documentaire ?

Le documentaire précise le sens que revêt la terminologie juridique « crime passionnel ». Me Bonnant, avocat de la partie civile, évoque : « Dans le meurtre passionnel, la victime est (…) pour partie coupable de son sort ». Ce qui justifie une diminution de la durée de la peine. L’avocat de Cécile Brossard rappelle que, pour démontrer un crime passionnel, il faudrait pouvoir démontrer que sa cliente « a agi dans un état d’émotion que les circonstances rendaient excusable »…
Que pensez-vous de cette notion de crime passionnel en regard des considérations cliniques qui occupent nos professions ? Pour y répondre, posez-vous ces questions :
Quelle est la couleur psychique des rédacteurs du Code pénal ? Qu’est-ce que le texte de loi omet de prendre en compte ? En quoi, dans l’affaire Stern, auteure et victime ont joué un rôle dans la mort du banquier ?

Quelques questions complémentaires :

  • Passé quel minutage du documentaire avez-vous compris quelle est la structure psychique d’Édouard Stern ?
  • À quel minutage avez-vous posé votre diagnostic s’agissant de la couleur psychique de Cécile Brossard ?
  • Éventuellement : quels sont les éléments qui vous manquent pour trancher sur la structuration psychique de chacun des amants ?
  • Quel est l’avocat qui vous en a appris le plus sur la personnalité des amants ? En disant quoi ?
  • Pensez-vous qu’il est vrai de dire, comme le fait l’avocat de la partie civile, que l’ex-femme de Stern garde un bon souvenir de ce dernier ?
  • Qu’avez-vous à dire au sujet du fait que les munitions qui ont été chargées dans l’arme qui a servi à tuer Édouard Stern n’étaient pas toutes les mêmes ? Quelle hypothèse pouvez-vous poser à ce sujet, en regard des structures psychiques impliquées ?
  • De quelles investigations policières complémentaires auriez-vous besoin pour lever les zones d’ombre relatives à l’éventuelle préméditation de l’acte ?
  • Enfin, une dernière question relative à la part personnelle hors contre-transfert (il est très important de bien se connaître soi-même pour travailler correctement en matière d’évaluation diagnostique, et de psychothérapie également aussi bien évidemment…) : qu’est-ce qui vous touche dans cette affaire ? Une fois défini, observez ce que cet élément vous apprend sur le crime.

Une dernière question, qui fera sans doute polémique, mais que les cliniciens peuvent entendre :
Si vous écoutez l’émission radio d’Hondelatte, vous en découvrirez davantage sur la façon dont Cécile Brossard a été évaluée. Quelle est l’injustice crasse dont elle est victime ? (deux éléments).

J’attends vos réponses avec impatience. Dans l’intervalle, je prépare une vidéo qui vous proposera mes réponses à ces questions.